L’amoxicilline, l’antibiotique le plus prescrit en France, connaît de « fortes tensions d’approvisionnement », selon l’Agence nationale de sécurité du médicament. Cette pénurie pourrait s’étendre jusqu’au mois de mars.
Atlantico : L’agence publique du médicament (ANSM) a récemment évoqué les « fortes tensions d’approvisionnement » sur l’amoxicilline, un antibiotique. A quel point cet antibiotique est-il important ? Quelles peuvent être les conséquences d’une pénurie ?
Loïk Le Floch-Prigent : L’amoxicilline est un antibiotique d’origine anglaise (Glaxo , maintenant GSK) – tout seul -Clamoxyl- ou avec de l’acide clavulanique -augmentin-, en comprimés, gélules mais surtout en suspensions buvables en flacons majoritairement prescrites chez les enfants . Il y a eu une augmentation de la demande de 30% cette année, sans doute parce que l’année dernière les précautions prises pour éviter le Covid avaient conduit à une meilleure prévention anti-bactérienne. La période actuelle est revenue à la normale saisonnière des années antérieures au Covid, et, il semble que l’ANSM veuille nous prévenir d’une pénurie potentielle, comme elle le fait aussi sur le doliprane ! Avec l’inflation des produits alimentaires et des factures d’énergie, la population du pays n’avait pas vraiment besoin de cette nouvelle annonce de pénurie, cela fait beaucoup avec les peurs véhiculées par la presse tous les jours. « Maintenant on ne va plus pouvoir soigner nos enfants ! ».
Rémi Salomon : L’amoxicilline est un antibiotique, donc un médicament qui agit contre les infections bactériennes. Ces infections sont nettement moins courantes que les infections virales. Il existe plusieurs familles d’antibiotiques, et l’amoxicilline appartient à celle de la pénicilline. Tout le monde connaît cet antibiotique car c’est le plus prescrit, il représente les deux tiers des prescriptions chez l’enfant. On l’utilise pour soigner les otites, les angines…
En cas de manque d’amoxicilline, on va chercher à prescrire d’autres types d’antibiotiques. On va donc se diriger vers des antibiotiques à plus large spectre, ce qui peut aggraver le phénomène d’antibiorésistance. De plus, on risque aussi un effet domino, et aggraver les pénuries pour d’autres médicaments.
Sans antibiotiques, on revient à la période d’avant la Seconde Guerre Mondiale, où les gens mourraient d’infections bactériennes. Les risques sont donc énormes et nous faisons face à un véritable problème de santé publique.
Comment expliquer cette pénurie ? Les autorités sanitaires auraient-elles pu l’anticiper ? Comment expliquer ce manquement ?
Loïk Le Floch-Prigent : Comme la population française a pu l’apprendre lors de la crise du Covid, notre industrie ne fabrique presque plus de principes actifs de médicaments qui viennent en grande partie de Chine et d’Inde. En ce qui concerne ces antibiotiques très largement utilisés, y compris pour le tiers d’entre eux sous la forme générique « Biogaran », laboratoire le mettant en boite en Mayenne, ils sont fabriqués en Grande Bretagne. Sanofi a satellisé sa filiale principes actifs API en 2020, sa filiale générique Zentiva a été vendue à un fonds d’investissement en 2018, ces activités ne sont pas dans ses priorités stratégiques. Il n’y a donc aucune manière pour les autorités sanitaires de mobiliser le grand industriel national sur ce sujet puisqu’il fait tout l’inverse. Si l’on rajoute à cela la pénurie de verre due à la crise actuelle de l’énergie qui ne permet plus de fournir des flacons, on peut dire que nous n’avons aucune action sur les risques de pénurie. Anticiper voudrait dire avoir une stratégie pour rapatrier des principes actifs en France, on en a parlé abondamment lors de la crise du Covid au sujet du doliprane mais il aurait fallu réaliser le diagnostic sur la fuite de la fabrication des principes actifs hors de France et donc revoir les normes et règlements environnementaux qui ne le permettent pas aujourd’hui. L’action anticipatrice n’a pas été réalisée parce que la réindustrialisation ce n’est pas aussi simple, il faut beaucoup de travail, un chef d’entreprise et de la volonté ! La politique émotive qui consiste à s’indigner et à vociférer ne suffit pas pour reconstruire un édifice que l’on a abattu.
Rémi Salomon : Plusieurs facteurs expliquent cette pénurie. Premièrement, il y a eu une augmentation de la consommation liée aux épidémies hivernales, qui semblent plus importantes cet hiver que les années précédentes. En 2020 et 2021, nous portions des masques et il y a donc eu moins de grippe et de bronchiolites. L’industrie pharmaceutique s’est adaptée à la demande qui a baissé et a diminué l’offre. En Amérique du Nord, le constat est identique et cette pénurie d’amoxicilline fait la une des journaux depuis presque un mois.
Nous faisons également face à un problème de production. Dans les années 1980/90, on fabriquait bien plus de médicaments sur le territoire français mais cette production a été délocalisée, à la fois pour des raisons de coûts de production mais aussi parce que ces industries chimiques sont polluantes. Nous sommes donc très dépendant de ce qui se passe ailleurs, en Chine et en Inde notamment. Un confinement dans ces pays et une baisse de la production pourraient donc avoir des conséquences en France.
Comme je l’expliquais précédemment, les tensions sont présentes depuis déjà plusieurs mois. De plus, il y avait déjà des alertes en Amérique du Nord. Les autorités sanitaires auraient donc dû anticiper la situation, être plus réactives.
Pourquoi ne faisons-nous rien face à la pénurie d’antibiotiques qui s’annonce ?
Loïk Le Floch-Prigent : Parce que nous nous sommes mis dans la situation que cela ne dépend plus de nous, nous avons jeté aux orties la souveraineté et l’indépendance et il va falloir des années, si nous le voulons vraiment, pour reconquérir notre liberté de soigner.
Rémi Salomon : Il ne me paraît pas normal que la production de médicaments essentiels réponde à des logiques essentiellement commerciales. Les médicaments doivent être considérés comme un bien commun et il faudrait relocaliser la production en France et en Europe. Un genre de service public devrait assurer une production minimale.
Quelques lois demandent de faire des stocks. Cela peut permettre d’éviter les pénuries. A-t-on vraiment un stock suffisant pour les médicaments essentiels ? Manifestement, non. Il faudrait contraindre ces industriels privés à assurer une production minimale des molécules essentielles.
Y a-t-il des moyens de limiter les risques de pénurie ? Peut-on prescrire des alternatives à ce traitement ?
Loïk Le Floch-Prigent : Il existe, bien évidemment, d’autres antibiotiques, mais avec les mêmes inconvénients, nous ne sommes maitres ni des principes actifs, ni de la fabrication des médicaments, cela n’a pas été une priorité nationale !
Il faut aussi souligner que nos prix de ventes sont 10 à 30% inférieurs à ceux de nos voisins, belges, allemands, suisses et italiens, ce qui peut facilement s’observer par l’affluence dans nos pharmacies frontalières, dans les périodes de crise une concertation active avec nos trois grossistes répartiteurs pourrait être intéressante.
Rémi Salomon : Il est déjà possible de diminuer la consommation. De nombreuses personnes sont traitées par des antibiotiques alors qu’elles sont atteintes par des infections virales, ce qui n’a pas lieu d’être. Il y a donc un mauvais usage des antibiotiques, ce qui pose d’ailleurs problème dans la mesure ou cela induit de l’antibiorésistance. En cas d’otite ou de d’angine, il serait préférable d’attendre un peu, de ne pas se précipiter sur les antibiotiques et éventuellement faire un test diagnostic.
Il est également possible de réduire légèrement la durée du traitement, en passant de 7 à 5 jours. Enfin, de nombreux pays font du déconditionnement, c’est-à-dire vendre des cachets à l’unité, ou vendre des boîtes de 5 comprimés au lieu de 7.
Peut-on espérer une sortie de crise dans les semaines ou mois à venir ? Comment ?
Loïk Le Floch-Prigent : Dans les semaines à venir, comme pour l’énergie électrique et d’autres produits, si la propagation des infections augmente on va recevoir des avis de sérieux pour gérer la pénurie , on va entendre des injonctions à comprendre la nécessité des rationnements, on va aller ici ou là pour déceler les stocks dormants… Nous ne sommes pas en face d’un problème conjoncturel, mais nous affrontons un handicap structurel auquel il faut que nous nous préparions à répondre. La politique de santé en France passe-t-elle par une sécurité de fabrication en France des produits de première nécessité ? On s’était déjà posé le problème lors du Covid avec les respirateurs, puis avec le doliprane, ce n’est pas nouveau, nous ne le découvrons pas en 2022 ! Nous essayons de favoriser, espérons-le, les fabricants français, nous avons vu que cela n’a pas fonctionné avec les vaccins, nous voyons que cela ne marche pas avec les antibiotiques, mais tous ces produits sont amplement consommés et remboursés en France ! Sans faire le travail des industriels, les responsables de la santé des Français devraient pouvoir suggérer, comme par le passé pas si éloigné, une priorité donnée aux médicaments soignant les maladies nationales. Personne n’y verrait d’inconvénients, en particulier les personnels médicaux et para médicaux comme les équipes de recherche.
Pas de déni de réalité, un bon diagnostic (incluant celui des excès d’interprétation des règlementations environnementales) et une volonté de faire… tout un programme !
Rémi Salomon : C’est assez dur de le savoir précisément. Cela dépendra de la capacité des industriels à réarmer leur production, et cela ne se fait pas du jour au lendemain. La presse américaine parle d’un retour à la normale fin décembre. Comme nous avons un léger retard par rapport à eux, nous pouvons espérer que la situation soit de nouveau acceptable d’ici fin janvier.
@loikleflochprigent. Pour lutter contre une recrudescence des MST, et protéger du HIV, la tendance actuelle ne recommande plus l’usage d’un préservatif, mais la prise (avant et après donc à vie pour certains) d’une trithérapie d’antiviraux (onéreuse, mais remboursée à 100 % ) et récemment s’ajoute un vieil antibiotique : la doxycycline ! Le problème réside dans le fait que celui-ci reste le seul traitement utilisé contre la syphilis (qui de nos jours tue encore et même en forte recrudescence chez les HSH). Portez-vous bien – Guy
Nous tombons un peu plus chaque jour que Dieu fait…
L’amoxicilline, dérivée de la pénicilline, est aujourd’hui l’antiobio le plus prescrit en France et dans le monde. Et si une diminution de la disponibilité en officine aura un impacte sur la population, c’est à l’hôpital que cela va se jouer. Car, les traitements lourds le sont à partir de produit sous plus forte concentration et souvent en intra-veineuse. De plus, c’est un produit largement utilisé en pré et post-opératoire afin d’éviter des complications liées à une éventuelle infection bactérienne, ce qui est très fréquent. Dit autrement, l’absence de cette molécule pourrait entrainer le décès de personnes par effet indirect !
Les gouvernements français auraient dû anticiper cette situation (et bien d’autres) il y a 30 ans, au moins en ce qui concerne les médicaments dit « de base ». Le pb, c’est que depuis quelques décennies rien ne doit se faire en dehors de l’UE. Or, là où il aurait été possible à la France de mettre en place un tissu industriel de laboratoires pharmaceutiques en 10 ans, cela est impossible, eu égard les règles et la complexité, de la faire au niveau de l’UE. Un Macron ne prendra jamais l’initiative de faire ce qu’il faut pour son peuple. D’abord l’UE et ses principes, ensuite la France…
Que va t il se passer ? Eh bien nous allons acheter ces produits à prix d’or, les cotisations des mutuelles vont augmenter, certaines personnes vont mourir faute de soin, et les laboratoires internationaux vont sélectionner les marchés les plus rentables… Un peu ce que l’on a vu avec le « vaccin » SRAR COV 2 Pfizer.
On aimerait avoir un bilan de la situation suite aux injonctions de relocalisation gouvernementales.
Pourquoi ne maitrise-ton pas le prix de l’électricité ? A cause d’embrouilles européennes ?
Les incantations des verts ont réussi à convertir la population au masochisme. Les mesures contraignantes sont plébiscitées.