Ghosn-Renault-Nissan : tout le monde est désormais d’accord, c’était bien un problème industriel !

Il a fallu un an pour que les yeux commencent à accepter la réalité ! L’arrestation de Carlos Ghosn à Tokyo recouvrait bien un combat industriel intense, et les « révélations » étaient connues de tous et n’étaient que des prétextes pour modifier une situation que le monde Japonais refusait, à savoir la primauté d’une société française, Renault, sur une société japonaise illustre et symbolique Nissan.
Rachetée dans un état calamiteux en 1999 par Renault à plus de 43% , ce qui en faisait l’actionnaire de référence, Nissan a été redressée par Carlos Ghosn et ses équipes. Il est ensuite devenu le patron de Renault en 2005 en restant celui de Nissan, il a bâti « l’Alliance » qui est devenue le premier constructeur mondial en 2017 lorsque Mitsubishi Motors est venu s’adjoindre au duo. La rationalisation des productions avec le maintien des marques et des distributeurs, les échanges fructueux avec le groupe Daimler (Mercédès) et les avancées en Roumanie (Dacia) en Russie et en Inde étaient célébrées comme la marque d’un patron visionnaire et charismatique. Seuls ses proches ajoutaient à ses qualificatifs élogieux celui d’amical et de sympathique et il est clair qu’il était à la fois admiré et jalousé. Son incarcération et sa descente aux enfers ont pu lui montrer qu’il avait rencontré un nombre important de détracteurs potentiels.
Un an après ce drame industriel que peut-on dire ?
Carlos Ghosn est en résidence surveillée au Japon, il ne peut plus voir, entendre ou communiquer avec son épouse depuis 7 mois, il n’a pas l’air d’avoir la totalité de son dossier judiciaire en mains et son procès est prévu …plus tard. Les pouvoirs publics français l’ont soutenu comme la corde soutient le pendu et il vient tout juste d’avoir la visite d’un ancien Président de la République , Nicolas Sarkozy et une demande de revenir à une justice « normale » de la part de parlementaires « Les Républicains » prestigieux. Il faut reconnaitre à Nicolas Sarkozy d’avoir toujours soutenu les français en difficulté à l’étranger, je peux en témoigner en ce qui me concerne, et c’est tout à l’honneur des hommes politiques signataires de s’exprimer, enfin, sur cette question qui risque de ne pas leur rapporter un électeur, cette tribune est courageuse.
Mais pour le pays la situation de Renault est plus importante, c’est une entreprise essentielle pour l’avenir du pays, le secteur automobile est structurant, implique des usines, des territoires, des villes, des emplois , des sous-traitants…Renault malade, ce n’est pas un petit rhume pour le pays, c’est un cancer qui va nous ronger et nous appauvrir collectivement. L’année qui vient de s’écouler est horrible, qu’est ce qui nous attend ?
Tout d’abord ce qui liait les trois entreprises était le patron , c’était une faiblesse mais une réalité acceptée par l’Etat actionnaire de Renault. Attaquer Carlos Ghosn, c’était fragiliser la position française, il fallait donc le protéger et le défendre ou puisque l’on savait que personne n’est inattaquable renforcer la position nationale en rappelant l’existence de Renault comme actionnaire de référence de Nissan. On a commencé par dire à Nissan que nous n’abuserions pas de notre position majoritaire (vous aurez nos votes quoi que vous décidiez !) et il ne restait plus aux japonais que de crucifier le patron affaibli. On s’est donc tiré une balle dans le pied et le patron en a fait les frais. On aurait pu alors le défendre(et il n’est jamais trop tard !) mais on a fait l’inverse, et ce n’était pas l’intérêt de la France .
Ensuite tout apparait au grand jour, à savoir que la situation de Nissan qui s’est « rejaponisé » avec l’assentiment de l’actionnaire (nous les français) va de mal en pis , ce qui va peser sur les résultats de Nissan, bien sur, mais aussi de Renault qui, sans exercer de pouvoir, en détient plus de 43%. Gribouille est bien français, vous l’avez compris ! Eh bien si l’on regarde les cours de Bourse , on peut considérer que le départ de Carlos Ghosn aura couté 15 milliards d’Euro aux deux entreprises en un an !
Pendant le même temps il a fallu décapiter l’entreprise japonaise car, puisque le patron de Nissan avait participé à la mise à mort de son patron, il devait disparaitre, et en retour le monde japonais a demandé que l’on fasse de même chez Renault. C’est ainsi que le Directeur Général , Thierry Bolloré a été sorti avec un grand nombre de cadres…il avait résisté à Nissan, vous pensez du crime !
Ainsi au bout d’un an on a deux entreprises (car Mitsubishi garde les pieds sur terre) qui sont dans l’ornière, qui bégaient une politique d’Alliance dont le penseur est en résidence surveillée « sans contacts « et on recherche avec des chasseurs de tête une équipe dirigeante pour redonner vie à un projet dont la plupart des promoteurs sont en train de disparaitre.
Il s’agit ici d’industrie, pas de diplomatie, un projet doit s’incarner puis se décliner , lorsqu’il y a position dominante capitalistique il peut y avoir Alliance, mais il y a une voix prépondérante, il y a des décisions à prendre , cela peut être consensuel et collégial, mais on sait comment on tranche à la fin si l’accord ne se réalise pas, et c’est d’ailleurs pour cette raison qu’il y a le plus souvent consensus. Il n’y a pas de rééquilibrage à négocier entre Renault et Nissan , il fallait y penser avant, il y a une urgence ici, le bateau coule et il faut que quelqu’un de compétent et de volontaire tienne la barre et refasse marcher les deux entreprises avec un leadership clairement affirmé. Il y va de l’avenir de l’automobile française et de l’avenir du pays !
Et ce n’est pas dans ce contexte d’irresponsabilité et d’amateurisme qu’il fallait que les politiques française et européenne à l’égard de l’automobile fragilisent encore plus nos fleurons nationaux ! La bataille engagée stupidement de mon point de vue contre le diesel est mal venue dans cette période d’incertitude, de même les règlements européens sur l’empreinte carbone qui veulent obliger l’industrie automobile à s’engager dans des investissements électriques ruineux sans que l’on puisse en prévoir la rentabilité et l’acceptation par les clients sont mal venus. Regardez nous donc avec deux entreprises phares, l’une décapitée et à la dérive et l’autre, Peugeot, obligée par le poids des investissements à engager ( réglementation européenne ) à se précipiter dans une fusion avec une entreprise italo-américaine. Mettre un maximum d’obstacles pour résoudre des équations difficiles est-elle une marque d’intelligence ?
Et en plus on a mis dans la Constitution le Principe de Précaution.

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