En annonçant le blocage des prix du gaz et la baisse des taxes sur l’électricité, le Premier ministre tente de masquer les effets catastrophiques produits depuis des années par le découplage entre les prix et la vérité des coûts.
Jean Castex a annoncé un « bouclier tarifaire » impliquant notamment que les prix du gaz seraient fixes jusqu’en avril. Est-ce politiquement une bonne stratégie ?
Cela fait maintenant des années que tous les spécialistes de l’énergie avertissent le Gouvernement que la politique menée est absurde parce qu’elle conduit à augmenter les prix sans bénéfice ni pour la baisse des pollutions, ni pour le contrôle des émissions de gaz à effet de serre. Hé bien nous y sommes et le Premier Ministre essaie de cacher jusqu’aux élections les effets de cette politique stupide sans, bien sûr, effectuer un constat et avoir fait le diagnostic, on n’agit pas sur les causes, donc on fait une politique de gribouille. Si les citoyens, encouragés par les commentateurs zélés, se satisfont de ces mesures conjoncturelles annonçant des lendemains difficiles et sont dupes, c’est une bonne tactique électorale, mais ce n’est pas une stratégie qui devrait agir sur les causes et non les effets.
Quels sont les risques que représenterait cette stratégie sur le plan économique ?
Ces annonces tiennent du « sauve qui peut » en ayant l’œil rivé sur une recrudescence de la révolte des Gilets jaunes, mais on oublie l’utilisation de l’énergie par les entreprises et leur chute de compétitivité ! Or nous savons que notre économie a besoin d’une énergie abondante et bon marché pour survivre et depuis des années l’Allemagne, la Commission Européenne et la France qui a fini par suivre font l’inverse, on raréfie l’énergie et on la renchérit. Début Octobre les effets de cette politique apparaissent, on essaie de les cacher sous le tapis, mais ils sont là et bien là avec une possibilité de retour de l’inflation que l’on croyait jugulée. Avec le grand écart que nous avons désiré entre les coûts et les prix, les marchés artificiels, les subventions, incitations diverses, personne ne s’y retrouve. On en arrive à juger une politique sur l’aptitude de l’administration à verser en un temps record des subventions sans penser à mesurer les effets réels de la politique menée, on marche sur la tête, mais on a l’air d’aimer ça puisque l’on repart sur les « chèques énergie » et les blocages des prix comme autrefois sur la baguette de pain. Répétons-le, ce qui nous est proposé est l’inverse d’une stratégie, c’est un sparadrap.
Doit-on craindre une certaine déconnexion avec les prix réels de l’énergie suite à cette décision ? Le contrecoup sera-t-il d’autant plus dur ?
Nous sommes déjà dans ce divorce entre les coûts et les prix et l’on va poursuivre dans cette orientation catastrophique. Il y a quelques semaines on se félicitait encore de l’accélération de la construction d’éoliennes en mer alors que l’absence de vent les rendait inopérantes et que leur rentabilité est clairement inexistante. On a dépensé des sommes folles pour construire des outils inutiles, on a fermé la Centrale Nucléaire de Fessenheim qui pouvait encore produire pendant 20 ans, on massacre la pêche côtière et la faune marine, on satisfait une minorité remplie d’idéologie en remplaçant le nucléaire décarboné par le gaz ou le charbon. Il est temps, non de signer des chèques sans provision, mais de revoir la politique, oublier les solutions mortifères des Allemands, faire valoir notre politique décarbonée auprès de la Commission Européenne et faire confiance aux ingénieurs français qui ont permis pendant des décennies d’avoir une énergie abondante et bon marché dans notre pays et une industrie compétitive, du moins sur ce plan énergétique.
Si l’on ne réagit pas maintenant ce sont des pans entiers de notre appareil industriel qui vont disparaître dans les mois qui viennent.