On a droit de rêver, la France retrouvant le chemin vers une industrie compétitive, innovante, souveraine, exportatrice, puissante et redonnant ainsi des couleurs à notre tissu économique et social, mais la réalité c’est que la route est longue ce qui n’interdit pas de prendre dès maintenant des mesures pour que tout cela arrive un jour.
Tout d’abord l’industrie se fait avec des hommes et des femmes compétents et entreprenants, ce n’est pas un jeu intellectuel où l’on écoute les idées des futurologues en en déduisant des fléchages financiers. Ce sont les gens de terrain qui peuvent le mieux définir les voies d’avenir susceptibles de nous ramener dans le peloton de tête des pays industriels. On a coutume de valoriser les grands programmes décidés et financés par la puissance publique pour expliquer l’essor de sociétés industrielles, mais c’est ignorer comment les choses se sont réellement passées, c’est un individu ou un groupe d’individus qui arrivent à convaincre de la justesse de leur vision, en argumentant à la fois sur les perspectives et les compétences qui les rendent possibles. La planification qui a conduit au redressement de la France a été une organisation pour gérer le bouillonnement des idées et des initiatives. Vouloir orienter est un désir de bureaucrate ou de technocrate, le succès ou l’échec dépendent de ceux qui vont faire le travail, ce sont eux qui sont décisifs. L’histoire a montré qu’il valait mieux sélectionner le personnel compétent que les projets prometteurs, et c’est très difficile à entendre pour des politiciens qui veulent montrer que ce sont eux qui sont les moteurs de la croissance… grâce à leur intelligence !
En conséquence plutôt que de passer du temps à vouloir définir où l’on doit aller et à rechercher les sujets préparant l’avenir du pays, il est préférable de définir les conditions d’une reprise effective de l’activité industrielle. Celle-ci repartira si elle se meut dans un pays bienveillant à son égard, lui permettant d’avoir une compétitivité fiscale, économique, règlementaire qui déclenchera chez les épargnants la volonté d’investir dans les entreprises. Il ne s’agit donc pas de faire des discours, d’annoncer des milliards d’un plan de relance, de réaliser des visites de sites industriels pour démontrer le souci que l’on a de leur développement, il faut prendre des mesures concrètes permettant aux industriels de survivre après les coups durs portés à leurs usines, puis de vivre et enfin de se développer sans avoir à faire nécessairement rentrer des capitaux étrangers, les loups dans la bergerie, pas plus que demander l’aumône aux pouvoirs publics
D’abord compétitivité fiscale, un impératif !
L’imagination fiscale de notre administration est proportionnelle à son incapacité à se réformer et à diminuer les dépenses de l’Etat. Nous sommes suradministrés, ce qui nous conduit, d’une part, à payer plus d’impôts que nos partenaires européens mais aussi à multiplier les dépenses pour répondre à la multiplication des agents envoyeurs déterminés de formulaires divers sur un nombre de sujets qui donnent le tournis. La punition est donc double, on paie et on doit passer du temps à répondre à la multitude des normes et règlements portés chacun par une personne différente. Certes la taxe professionnelle a été supprimée, mais on a créé les impôts de production correspondant à 3,6% du chiffre d’affaires, impôts « originaux » inconnus de nos voisins européens. On promet une diminution de 11% cette année 2021, donc la surimposition ne sera plus que 3, 2% ! Attendrons-nous dix ans pour avoir le même traitement que nos homologues ? Et qui nous protégera d’une création nouvelle ? Tant que le train de vie de l’Etat sera trop élevé c’est un cercle vicieux. Ces taxes ne sont pas les seuls problèmes, une remise à plat est nécessaire dans tous les secteurs industriels, une comparaison avec nos voisins, une stabilité dans le temps et un contrôle fiscal remplaçant l’inquisition fiscale actuelle.
Compétitivité économique et réglementaire ensuite
On a coutume de dire que les charges sur salaires sont trop élevées en France et qu’elles ont conduit aux délocalisations industrielles. Pour un grand nombre de produits « manufacturés » désormais en Asie c’est une évidence, mais il faut ajouter à ce fardeau plusieurs autres mesures, les 35 heures et les RTT, et l’ensemble des mesures environnementales qui s’enrichissent de nouvelles pages de normes et règlements tous les jours et qui finissent en surcouts par rapport à la concurrence, tandis que nos points forts de compétitivité sont rognés jour après jour par des négociations internationales qui oublient de défendre nos atouts nationaux. Nous manquons de vigilance et d’anticipation sur les conséquences industrielles des mesures que nous défendons avec notre foi dans les grands principes. Humaniser le travail et assurer au personnel une participation au fruit de leur travail, qui peut être contre ? Respecter l’environnement, veiller à la santé de tous et en particulier à celle des employés, qui pourrait aujourd’hui plaider le contraire ? Mais transformer ces bons sentiments en littérature abondante, rigide, contradictoire et à l’évolution permanente a été une erreur fondamentale qui conduit désormais l’ensemble des textes règlementaires à l’obésité et aux pratiques bureaucratiques à la fois anti-industrielles et anti-scientifiques. La transformation des bonnes intentions en textes et leur interprétation tatillonne et inquisitoriale ont désormais conduit à la multiplication de personnel non productif, au sein des grandes entreprises ou comme conseils extérieurs onéreux pour les entreprises de taille moyenne ou petite. Les délocalisations occasionnées par les investissements conformes aux normes et règlements mais souvent injustifiés par les contextes ont été et sont toujours nombreuses car la maxime de la naissance de l’écologie moderne du Congrès de Stockholm en 1973 « penser globalement, agir localement » a été jetée aux oubliettes par les idéologues et les bureaucrates. Il faut d’urgence revenir à l’examen au cas par cas des mesures à effectuer et arrêter de vouloir satisfaire des textes qui ignorent les points d’application : revenir au terrain et à ses réalités est essentiel.
Enfin il ne faut pas oublier nos points forts historiques fortement entamés par les bêtises commises ces dernières années : une éducation scientifique et technique qui a placé très haut la recherche et l’industrie française, une politique énergétique visant l’indépendance électrique et réussissant à nous approvisionner en énergie abondante et bon marché, et l’institution d’un Crédit-Impôt- Recherche (CIR) qui a encouragé le progrès industriel de manière déterminante. Le bagage scientifique de l’ensemble de la population a régressé, l’idéologie et l’appât du gain ont gravement endommagé notre situation électrique avec la fermeture de Fessenheim et les annonces de rétrécissement nucléaire pour favoriser des énergies solaires et éoliennes intermittentes et onéreuses, enfin les lois budgétaires rognent chaque année l’originalité de notre CIR au point d’en faire aujourd’hui un instrument bureaucratique dont le sens disparait peu à peu. Il faut savoir revenir sur les décisions et les orientations imbéciles, on appelle cela le retour d’expérience, on a droit de faire des erreurs, pas de les répéter.