Pénuries d’antibiotiques : vers un hiver catastrophe pour la France ?

Les professionnels de santé sont confrontés à des pénuries d’antibiotiques et à des difficultés d’approvisionnement concernant l’amoxicilline. Au-delà des problèmes de santé publique, la pénurie de médicaments interroge sur les pratiques économiques de l’industrie pharmaceutique.

Atlantico : L’automne et l’hiver 2023 ont été marqués par une pénurie d’amoxicilline. Cette année, le même phénomène pourrait se produire en raison d’un rappel d’un rappel annoncé par un communiqué de l’ANSM. Va-t-on assister à des difficultés pour certains médicaments et antibiotiques pour cet hiver comme l’amoxicilline ?

Loïk Le Floch-Prigent : Bien sûr, nous assistons depuis des mois à une pénurie de produits essentiels pour nos enfants, nos personnes âgées, dans toutes les pharmacies de France, y compris celles du Triangle d’or à Paris, il n’y a pas que l’amoxicilline, mais aussi le paracétamol ou le salbutamol (maladies respiratoires). Tout le monde le sait, le déplore, le constate, mais le mal est profond car ce qui est essentiel pour les Français ne l’est plus ni pour l’Etat ni pour les industriels. C’est le point d’aboutissement d’un lent abandon de la santé quotidienne de nos concitoyens qui sont de plus en plus nombreux à le constater.

Comment expliquer de telles pénuries en France ? Est-ce lié à un problème industriel ou de législation ?

Loïk Le Floch-Prigent : Tout a été fait pour en arriver là ! La France est le pays européen le plus encadré pour le prix de ses produits pharmaceutiques ce qui conduit à la vente de produits « matures » c’est-à-dire largement diffusés depuis longtemps les moins chers. Pour ces produits les principes actifs ont donc été délocalisés grâce aux contraintes spécifiques à notre pays en termes d’environnement et on doit désormais aller les acheter en Inde ou en Chine. Ce n’était pas une fatalité, nous avons voulu ce qui est arrivé, nous voulions le moins cher tout en éloignant les chimistes pollueurs. Par ailleurs les industriels ont voulu conserver leurs marques, l’Etat a donc favorisé les « génériques » comme Biogaran (Laboratoires Servier) ou les produits Sanofi regroupés dans « Zentiva ». Mais ces entités ne gagnent plus d’argent, elles sont donc en vente et même le produit vedette des Français le Doliprane (paracétamol-Sanofi) est proposé à travers le monde à qui veut l’acheter. Il y a depuis des dizaines d’années un désintérêt total de tous les Gouvernements successifs sur la politique industrielle du médicament avec un soutien financier de l’Etat avec beaucoup de trompettes sur les produits rémunérateurs contre le cancer (oncologie) le diabète ou l’obésité.

Etat et industriels se sont renvoyés la balle de l’inaction à l’égard des produits essentiels pour la majorité des Français, les deux sont coupables à mes yeux, car, à un moment les industriels de la Santé auraient dû expliquer à la population comment la politique suivie allait conduire à la pénurie.

Pas plus tard que le 24 Septembre l’ANSM, encore une agence !, a condamné 11 laboratoires en France à 8 millions d’amendes pour non-conformité de stocks de sécurité… après un longue enquête. Réponse dérisoire et inutile à un problème gravissime, le déni de réalité du monde politique conduisant au recul de la politique de santé.

Quel pourrait être l’impact médical pour les patients qui n’auront pas ces antibiotiques ? Est-ce que cela pourrait entraîner un grand nombre de décès en France ?

Dr Guy-André Pelouze : La pénurie d’amoxicilline, un antibiotique de la classe des pénicillines largement utilisé, pourrait avoir des conséquences médicales pour les patients qui en dépendent pour traiter les infections bactériennes. L’amoxicilline est particulièrement importante pour traiter les infections respiratoires, les infections des voies urinaires, les infections de l’oreille et certaines infections cutanées d’origine bactérienne. Comment la pénurie pourrait affecter les patients?

Le retard de traitement et l’aggravation des infections

L’amoxicilline est essentielle pour traiter de nombreuses infections bactériennes. Sans un accès rapide à l’amoxicilline, ces infections pourraient s’aggraver et entraîner des complications plus graves. Si les patients n’ont pas accès à l’amoxicilline, leurs infections peuvent persister et se propager, en particulier dans les milieux en contact étroit comme les écoles, les hôpitaux et les centres de vacances.

L’utilisation d’antibiotiques alternatifs

Les médecins peuvent recourir à d’autres antibiotiques, mais cela pourrait augmenter le risque de résistance à ces antibiotiques de substitution. L’amoxicilline est choisie en raison de son efficacité et aussi de son faible potentiel de résistance par rapport à d’autres molécules. Certains antibiotiques alternatifs peuvent être moins efficaces pour certaines infections ou s’accompagner d’un risque plus élevé d’effets secondaires, ce qui peut entraîner des complications chez les populations vulnérables, telles que les enfants, les personnes âgées ou les immunodéprimés.

L’impact sur les patients chroniques et vulnérables

Les patients souffrant de maladies respiratoires chroniques, telles que la pneumopathie chronique obstructive (BPCO) ou l’asthme, comptent souvent sur l’amoxicilline pour traiter les infections qui surviennent compte tenu de leur état. Les retards de traitement peuvent entraîner des hospitalisations ou des conséquences plus graves. Les patients pédiatriques et âgés : Les enfants et les personnes âgées, qui sont plus sujets aux infections bactériennes, peuvent être exposés à des risques sanitaires plus élevés si l’amoxicilline n’est pas disponible. Par exemple, les infections non traitées chez les enfants, comme les infections de l’oreille ou la pneumonie, peuvent entraîner des complications plus graves telles que la perte d’audition ou l’insuffisance respiratoire.

Risque d’augmentation des hospitalisations

En l’absence d’un traitement antibiotique approprié, les patients peuvent présenter une infection régionale voire une septicémie, un état potentiellement mortel résultant d’une infection généralisée. Dans des conditions exceptionnelles, les hôpitaux pourraient être débordés si un grand nombre de patients devaient s’aggraver. Bien qu’il soit difficile de prévoir un nombre précis de décès, une pénurie d’amoxicilline prolongée ou grave pourrait augmenter les taux de mortalité chez les patients souffrant d’infections graves ou présentant des maladies sous-jacentes. Le risque de décès toucherait principalement les personnes qui tardent à recevoir un traitement efficace pour des infections qui pourraient être traitées par l’amoxicilline. Le contexte sanitaire français expose cependant moins que d’autres à ces situations extrêmes. Le système de soins français est développé et des alternatives sont disponibles pour la plupart des médicaments. Cependant, une pénurie prolongée d’un médicament clé comme l’amoxicilline pourrait peser sur les ressources, en particulier pendant les mois d’hiver, lorsque les infections respiratoires atteignent leur paroxysme.  S’il est peu probable qu’une seule pénurie d’amoxicilline entraîne un grand nombre de décès, les conséquences indirectes, telles que les retards de traitement, l’augmentation des infections résistantes aux antibiotiques et l’aggravation de certains patients, pourraient avoir de graves effets à moyen terme sur les structures de soins critiques.

Est-ce lié également à des pratiques économiques de l’industrie pharmaceutique avec des industriels qui préfèrent certains marchés qui rapportent plus par rapport à la France ? La France est-elle moins rentable que d’autres pays ?

Loïk Le Floch-Prigent : Un industriel se doit de gagner de l’argent à la fois pour ses actionnaires, ses salariés et ses investissements. Quand il constate qu’une bonne gestion ne suffit plus à garantir sa survie, il se doit de choisir pour garantir son avenir des produits à haute valeur ajoutée. Si le pays d’accueil lui interdit de gagner de l’argent sur certaines références il les abandonnera tôt ou tard. C’est ce qui explique le déménagement en Asie de beaucoup de produits. On ne peut donc pas reprocher aux industriels de faire leur travail, mais ils se doivent d’avertir les pouvoirs publics et la population de la portée des décisions qu’ils sont amenés à prendre. La réputation de big Pharma comme on l’appelle de gagner beaucoup d’argent et de rouler sur l’or n’a pas permis un examen serein de la situation. La France est le moins rentable des pays d’Europe pour les produits « matures » ils sont donc abandonnés !

Beaucoup d’industriels petits et moyens ont voulu garder ces produits en France. Ont-ils été soutenus par quiconque (y compris par les médias) ? Non ! Trop facile de taper sur l’industrie pharmaceutique en oubliant les efforts entrepris pour caricaturer un secteur autour de quelques monopoles ou oligopoles applaudis par ailleurs pour leurs soutiens à la recherche et aux œuvres charitables. Il y avait, il y a toujours des professionnels qui veulent bouleverser la politique du médicament, qui y croient, qui essaient de bâtir… mais personne ne veut les voir ni les aider.

Aucune des big Pharma ne se sent responsable elles regardent le marché planétaire et chaque Chef d’Etat les honore quel que soit le pays ! Cela nous éloigne de la pénurie de l’amoxicilline en France ? Non ! Car pour nous tous un produit pharmaceutique n’est pas un produit comme un autre, c’est un médicament susceptible de sauver des vies, de restaurer des santés, de limiter des souffrances, et il ne faut pas abandonner le retour à une éthique d’une profession qui existe encore dans bon nombre de laboratoires.

La réponse française doit être d’urgence l’arrêt des subventions de l’Etat à Big Pharma et l’aide immédiate aux génériques français « en vente à l’encans » et aux start-ups de produits « matures ».

Emmanuel Macron s’était engagé à endiguer ce phénomène avec une ambition industrielle sur la production de médicaments et le rapatriement de certaines technologies ? La France a-t-elle commencé à rattraper son retard ?

Loïk Le Floch-Prigent : Pour endiguer un phénomène, il faut l’analyser avec soins et établir un diagnostic. Il ne suffit pas de parler ensuite mais d’agir sur les causes. Pour les médias, l’industrie Française c’est le CAC 40, c’est profondément inexact et trompeur et donc pour beaucoup de Français, l’industrie pharmaceutique française c’est « Sanofi ». Et si quelque big pharma étrangère veut une implantation dans notre pays il aura tous les honneurs. Nous récoltons aujourd’hui les conséquences de ce prisme déformant qui conduit nos politiques et nos médias à se féliciter de nos succès ! Nous sommes loin du réel, il faut le regarder vite car nos enfants sans antibiotiques, nos personnes âgées et nos asthmatiques vont souffrir alors que nous avons tout pour les soulager. Mais de grâce arrêtons de parler, agissons, tout est possible encore, nous restons un grand pays avec un corps médical et pharmaceutique extraordinaire dévoué à la santé de l’ensemble de la population.

Quel est l’impact des pénuries de médicaments en France en termes de santé publique ? Cela doit-il conduire à adopter une autre méthode et une autre approche sur le plan médical et de santé publique, au-delà des difficultés industrielles ?

Dr Guy-André Pelouze : L’impact des pénuries de médicaments en France, en particulier d’antibiotiques tels que l’amoxicilline, devient un problème de santé publique préoccupant. Ces pénuries n’affectent pas seulement les soins immédiats aux patients, mais ont également des implications plus larges pour le système de santé et la stratégie de santé publique à long terme. La lutte contre les pénuries de médicaments devrait en effet conduire à repenser les soins d’un point de vue médical et de santé publique, au-delà des défis liés à la chaîne d’approvisionnement industrielle. Pour autant c’est grâce à une meilleure efficience du système de soins que la réponse est la plus adaptée. Consacrer la ressource à des patients qui peuvent en bénéficier est très différent de dépenser la ressource dans une optique de droits à.

Impact des pénuries de médicaments sur la santé publique en France

Lorsque des médicaments essentiels tels que les antibiotiques ne sont pas disponibles, les traitements peuvent être retardés, ce qui entraîne des complications dans des conditions qui auraient pu être gérées autrement. Les maladies chroniques, les infections et les affections aiguës peuvent s’aggraver, ce qui risque d’augmenter le nombre d’admissions à l’hôpital. Les patients peuvent recevoir des traitements moins efficaces ou de deuxième intention, ce qui peut entraîner une guérison incomplète ou une maladie persistante, en particulier chez les populations vulnérables telles que les enfants, les personnes âgées ou les personnes souffrant de maladies chroniques. Le risque accru de résistance aux antimicrobiens (RAM) est un sujet complexe plus souvent en rapport avec un usage inapproprié des antibiotiques. Néanmoins, la surutilisation des antibiotiques à large spectre, en l’absence de traitements de première intention comme l’amoxicilline, peut accroître le risque de résistance aux antibiotiques, l’un des problèmes de santé publique les plus urgents au niveau mondial. Les pénuries de médicaments peuvent saper les efforts de lutte contre les infections, permettant aux souches bactériennes résistantes de se propager plus facilement, ce qui entraîne des infections plus graves et plus difficiles à traiter. Les patients des zones rurales ou mal desservies peuvent avoir moins d’accès aux médicaments alternatifs ou aux soins spécialisés. Ces populations dépendent souvent des pharmacies locales, qui peuvent être plus durement touchées par les pénuries même si ceci n’a pas été établi par des données d’enquête.

Il est possible que les coûts des soins soient plus importants. Les pénuries de médicaments peuvent entraîner un taux plus élevé d’admissions à l’hôpital et des séjours plus longs à l’hôpital en raison de complications dues à des infections non traitées ou mal gérées. Toutefois ceci aussi n’a pas été établi. Pour autant il n’y a pas de statistique élaborée sur le sujet. Les médecins et les pharmaciens doivent consacrer plus de temps à la recherche d’alternatives et à l’adaptation des traitements, ce qui détourne les ressources des soins aux patients mais doit faire partie des stratégies d’adaptation puisque la question à la pénurie est maintenant structurelle. La santé publique et le système de soins sont basés sur la confiance,  les pénuries persistantes de médicaments peuvent entraîner une méfiance du public à l’égard de la capacité du système de soins à fournir un traitement efficace et en temps voulu. Cela peut décourager les gens de se faire soigner ou de suivre les traitements prescrits, ce qui peut aggraver les résultats en matière de santé publique.

Repenser le traitement des pénuries de médicaments

Les pénuries de médicaments exigent une stratégie. Cette dernière doit être proactive et systémique, allant des défis industriels à la mise à disposition des molécules en pharmacie sur tout le territoire.

Plus de concurrence dans la chaîne d’approvisionnement et production de médicaments

La France devrait favoriser la relocalisation de la production pharmaceutique, en particulier pour les médicaments génériques essentiels et peu coûteux comme l’amoxicilline. Cela permettrait de réduire la dépendance à l’égard des fournisseurs internationaux, en particulier en Chine et en Inde, où les perturbations ont un effet d’entraînement. Cela peut se faire par des mesures d’allègement de la bureaucratie et de la réglementation mais aussi en favorisant la concurrence et l’entrée de nouveaux investisseurs. La constitution de stocks stratégiques de médicaments essentiels peut contribuer à prévenir les pénuries, en particulier pendant les périodes de forte demande comme la saison de la grippe ou les pandémies. C’est toutefois assez difficile à gérer comme tous les stocks et de surcroît cela coûte cher. On entend aussi certains affirmer qu’il faut encourager les entreprises pharmaceutiques à s’approvisionner en matières premières auprès de plusieurs fournisseurs pourrait atténuer le risque de goulots d’étranglement au niveau de la production. C’est déjà ce que font les entreprises pharmaceutiques. Ce qui se passe c’est que l’extraordinaire augmentation de la demande liée à l’élévation des ressources consacrées aux soins sur la planète (une “bonne” nouvelle) déséquilibre fortement la production.

Des systèmes numériques permettant de suivre la disponibilité des médicaments en temps réel ainsi que des modèles appuyés sur l’intelligence artificielle permettraient aux pharmacies et aux soignants de réagir plus rapidement aux pénuries et de prendre des décisions plus éclairées en matière de prescription et de stockage des médicaments.

Plus d’efficience dans les prescriptions en ambulatoire comme en hospitalisation

Étendre les programmes de gestion des antibiotiques qui encouragent l’utilisation rationnelle des antibiotiques est indispensable. En veillant à ce que les antibiotiques ne soient prescrits qu’en cas de nécessité, la demande de ces médicaments peut être mieux gérée, ce qui réduit la pression sur les chaînes d’approvisionnement. Au moins le tiers des prescriptions actuelles ne sont pas justifiées. Dans une cohorte de personnes âgées à faible risque, 46 % des patients présentant une infection des voies aériennes supérieures d’origine virale se sont vu prescrire des antibiotiques. Autre outil, encourager les prescripteurs à avoir des protocoles de traitement flexibles qui incluent des alternatives lorsque les médicaments de première ligne ne sont pas disponibles, sans compromettre la qualité des soins pourrait améliorer les temps de prise en charge. Enfin, encourager le développement et l’utilisation de traitements non antibiotiques pour certaines affections lorsque cela est possible, afin de réduire la dépendance aux antibiotiques et d’atténuer potentiellement les pénuries. Enfin, comment ne pas évoquer la dispensation exacte de la prescription, véritable serpent de mer en France? Il y a une forme d’abandon du bon sens quand en période de pénurie et de diminution des durées de traitement (passage de 7 à 5 jours dans certaines infections) nous persistons à utiliser des médicaments vendus en emballage à contenu fixe et donc à en gaspiller.

Plus de coopération au sein de l’UE

La France pourrait probablement bénéficier d’une collaboration accrue avec d’autres pays européens pour partager les réserves de médicaments, harmoniser les réglementations de la chaîne d’approvisionnement et élaborer conjointement des plans d’urgence en cas de pénurie. Cependant il y a un éléphant dans la pharmacie c’est l’assurance maladie française qui continue à croire qu’il faut faire une pression maximale sur ce qui n’est plus un prix mais un tarif d’achat des médicaments. Les tarifs de la Sécu sont parmi les plus bas de l’UE ce qui contribue évidemment aux pénuries hexagonales. Les conséquences sont délétères même si la Sécu cherche à travers ce bras de fer à donner des gages idéologiques à ceux qui pourfendent Big Pharma. Compte tenu de gisements de gaspillage, de fraude et d’inefficience il serait plus rationnel de se concentrer sur ces derniers. Enfin rappelons que la Sécu fait des choix: 6 milliards de transports dits médicaux et 32 milliards de médicaments sur 236 milliards de dépenses de soins.

En finir avec la confusion entre infections virales et bactériennes

Sur ce point capital il faut insister sur la disponibilité d’un test biologique pour lever l’incertitude entre infection virale et bactérienne par exemple devant un patient fébrile présentant des signes respiratoires. Le dosage de la procalcitonine permet aujourd’hui de ne plus prescrire des antibiotiques à un patient fébrile “au cas où”. Alors que le nombre d’affections virales respiratoires graves est au premier plan dans les affections saisonnières, il faut rappeler que les vaccinations contre la grippe, le virus respiratoire syncitial (bronchiolite) et la covid-19 sont disponibles et devraient être mises en avant. Par ailleurs informer les patients sur les complications des antibiotiques et expliquer les risques de résistance, de pénurie et de prescriptions inutiles. Pendant les pénuries, une communication claire avec le public sur les raisons des pénuries, la durée prévue et les alternatives disponibles est cruciale pour maintenir la confiance et éviter la panique. Améliorer le retour en pharmacie des comprimés ou injections d’antibiotiques non utilisés et financer des études réelles (pas des sondages) sur cette question des antibiotiques achetés et non utilisés.

Deux évolutions politiques sous estimées

Ces pénuries sont des stress tests du système de soins et des structures de santé publique c’est-à-dire des médecins et de l’environnement dans lequel ils évoluent et dont la qualité des décisions dépend.

La première conséquence majeure est de développer nos capacités d’adaptation. Car les solutions ne dépendent pas du seul facteur de production. C’est plutôt un bien car nos pays peuvent traverser des urgences systémiques comme les pandémies, les guerres ou bien les catastrophes naturelles. Apprendre à s’adapter est essentiel, mesurer notre performance d’adaptation est nécessaire. De ce point de vue il est possible d’affirmer que l’essentiel des ressources est aujourd’hui centré sur le quotidien à charges constantes. C’est le principal point faible.

La deuxième conséquence majeure pourrait s’intituler la fin du mythe de la ressource gratuite. Le tout gratuit, le “j’y ai droit quoi qu’il en coûte” (c’est-à-dire même si je jette les médicaments après avoir arrêté au bout de 48 heures) ont conduit à une surutilisation des antibiotiques en médecine humaine (et animale). Il est encore temps de s’apercevoir que la propagande de la logique de moyens (“du pognon pour l’hôpital” peut on lire sur des pancartes de manifestants) est une impasse car chaque fois elle conduit à prescrire des sparadraps en milliards d’euro qui cachent et protègent les dysfonctionnement de l’organisation du système à la fois des soins mais aussi des structures de santé publique. Il n’y a pas de ressource gratuite et d’ores et déjà nous vivons cette prise de conscience. De gré ou par la force non plus des pénuries mais d’une faillite.

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